Le retour (éclair) de R.
Hier soir un peu avant minuit j’ai reçu un message sur ma boîte de réception facebook de R. Cela faisait 10 ans que je n’avais plus entendu parler de lui. Depuis qu’il avait disparu du jour en lendemain sans explication aucune.
"Pensées africaines ! Rien à rajouter, tu es exceptionnelle, je regrette beaucoup de choses!"
Curieusement ça m’a fait rire. Malgré tout ce qui avait pu se passer entre nous, j’avais toujours gardé un souvenir ému de celui que j’appelais mon petit poulet sans savoir d’ailleurs pourquoi. Je lui ai répondu gentiment, j’étais curieuse, on l’est toujours quand on retrouve un copain de fac.
R. et moi nous étions rencontrés au milieu des années 90, à la fac. Il était tout de suite venu vers moi, timidement, peut être parce que j’ai une tête d’algérienne, peut être à cause de mon grand sourire, je ne sais pas. Il arrivait de la fac d’architecture d’Alger où il avait été un des leaders du mouvement étudiant qui avait précédé la guerre civil. Les menaces du GIA l’avaient fait fuir et il avait débarqué à Paris , chez un oncle , un parrain de la mafia kabyle de l’époque. Je l’avais pris sous mon aile, lui avait fait découvrir mon Paris, nous étions devenus amis. A l’époque, je n’en avais aucune idée mais il était amoureux de moi, de ma liberté, de ma spontanéité. Je ne l’avais pas vu. Je l’avais perdu de vue quand j’étais partie à l’étranger. En réalité, j’avais disparu, une de mes spécialités.
10 ans plus tard (à croire que c’est notre cycle), je l’avais retrouvé par hasard dans un bar de Pigalle où je faisais les 400 coups et presque naturellement nous avions fini la nuit ensemble. Notre relation avait duré le temps d’un été où nous avions beaucoup ri, beaucoup bu, beaucoup fumé. Et puis sans crier gare il avait disparu à son tour sans une explication. J’avais été blessée, pas tant qu’il me quitte mais qu’il ne comprenne pas que ça n’avait pas vraiment d’importance , que pour moi il avait toujours été d’abord un ami et que la sexualité dans cette relation était plutôt secondaire. Je n’ai jamais su ce qui s’était passé dans sa petite tête mais j’avais dans l’idée qu’il était retourné avec son grand amour, son ex. Je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir. Après tout, j’avais fait la même chose quelques années plus tôt.
"je vais bien, je suis un Tintin arabe à Dakar ! Vieux et aigri avec 3 enfants. Paris et très loin, beaucoup de nostalgie".
Je n’en saurais pas plus. C’est une spécialité de mes ex de faire des apparitions éclairs, de se rappeler à moi et de disparaître à nouveau. Comme si ils avaient peur de retomber dans une addiction néfaste mais qu’ils ne pouvaient se décider à me sortir complètement de leur vie.